Pas de vacances pour l’opérette !
La saison estivale a démarré en trombe avec La Route fleurie à Aix-les-bains, talonnée par La Belle de Cadix à l’opéra des Landes : les bons ouvrages de Lopez font toujours recette. En attendant le traditionnel festival de Lamalou, Nice et son théâtre de verdure ont accueilli un autre titre phare du répertoire : L’Auberge du Cheval blanc.
Melcha Coder est fière de nous le présenter, plus de 20 ans après la création du festival qui a enchanté les innombrables amoureux de l’opérette. Cette Auberge, créée en France en 1932 et estampillée « opérette à grand spectacle », n’a jamais quitté l’hexagone, faisant les beaux soirs du Châtelet et de bien d’autres scènes internationales.

Serge Manguette nous propose avec cette lecture une véritable comédie musicale, genre qu’il aime et maîtrise habilement. Deux airs rarement chantés (un duo Josefa-Léopold et un autre Clara-Célestin) ont rejoint les nombreux tubes de ce bijou musical, dont on ne se lasse pas !

La réussite de cette représentation provient déjà d’un casting soigneusement choisi : Pauline DesCamps incarne une délicieuse Josefa. Cette jeune mezzo-soprano (qui passe allègrement de Carmen à La Périchole) dégage une vitalité débordante : timbre velouté, diction parfaite, et passe du comique à l’émotion avec aisance et élégance. Ses atouts de comédienne sont à saluer ; voilà une artiste complète que nous aurons plaisir à suivre.
Face à elle, l’irrésistible Rémi Mathieu incarne un touchant Léopold, ténor aussi talentueux que séduisant qui tire amplement le meilleur de ce rôle emblématique.
Sabrina Colomb (souvent applaudie à Nice) se révèle toujours aussi charmante, évitant par son interprétation délicate les pièges du rôle un peu falot de Sylvabelle qu’elle valorise au mieux.
De même, Priscilla Beyrand nous amuse beaucoup, sans caricaturer le personnage de Clara, trop souvent représentée comme une sotte. Son association, avec le Célestin impeccable et agile de Fabio Prieto, fonctionne à merveille.
Frédéric Diquero (peut-être un peu trop mature pour le rôle de Florès ?) déploie ses qualités vocales, qui ne sont plus à prouver.
De multiples clins d’œil lorgnent vers le burlesque : nous sommes un peu dans la commedia dell’ arte avec Richard Rittelman, cocasse professeur Hinzelman, tandis que Thierry Delaunay, le maladroit bras droit de Léopold, est ici renommé Rudy. Point de Picolo, mais pourquoi pas ?
Le Bistagne de Didier Veschi nous a semblé peut-être un peu trop sage, tandis que l’empereur (Jean-Pierre Barbero, personnalité locale) s’offre pour sa part un franc succès.

Les artistes de la troupe, réunis au complet pour les scènes d’ensemble, forment le chœur : voilà une jolie trouvaille du metteur en scène, fort astucieuse en vérité. Ballets et costumes colorés, ça bouge vite et efficacement ; un coup de chapeau à Serge Manguette. On en redemande !
Sébastien Driant conduit l’orchestre harmonique de Nice, au meilleur de sa forme, au rythme jazzy du fox-trot, et le charmant ballet de Contre-Ut apporte une indéniable fraîcheur à ce spectacle estival.
Philippe Pocidalo
31 juillet 2025
L’Auberge du Cheval Blanc (Ralph Benatzky et divers autres compositeurs)
Direction artistique : Melcha Coder – Mise en scène et chorégraphie : Serge Manguette – Ballet Contre – Ut – Orchestre Harmonique de Nice, direction : Sébastien Driant – Décor et costumes : Elena D’Angelo-Milan.
Distribution :
Pauline DesCamps (Josefa) – Sabrina Colomb (Sylvabelle) – Priscilla Beyrand (Clara)
Rémi Mathieu (Léopold) –Frédéric Diquero (Florès) – Richard Rittelman (Hinzelman) – Thierry Delaunay (Rudy) – Didier Veschi (Bistagne) – Jean-Pierre Barbero (l’Empereur) – Fabio Prieto (Célestin).